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MIREILLE LABORIE

Longtemps, je me suis couché de bonne heure

25 Septembre 2011, 15:17pm

Publié par mireille.laborie

 

 

 

Vernissage 15

 

 

Longtemps,  je me suis couché de bonne heure.  

Exposition  du 24 septembre au 12 novembre 2011.

Galerie Deleuze-Rochetin  30700  Arpaillargues

 

Conçue autour de la figure emblématique de Marcel Proust et de son œuvre magistrale « À la recherche du temps perdu » l’exposition que nous proposent Mireille Laborie et Jean-Pierre Loubat est une invitation à entrer avec leurs yeux dans l’univers foisonnant de l’écrivain qui sert de fil conducteur à leur travail. 

Mireille Laborie a choisi d’aborder l’œuvre proustienne sous le prisme de la couleur et de la matière.

Cette double entrée dans la Recherche est des plus intéressante d’une part car l’écriture impressionniste de Proust  abonde de détails chromatiques, d’autre part car l’écrivain est très sensible aux qualités de la matière, notamment celle des tissus : il évoque fréquemment le velouté, le soyeux, le satiné toutes qualités pouvant s’appliquer à la peinture.

Intimement liée à la mémoire et tout particulièrement à la mémoire involontaire comme peuvent l’être une odeur ou une saveur, la couleur par sa puissance évocatrice est donc chez Proust l’un des fils conducteurs de l’écriture, notamment dans l’évocation de ses personnages. Ce fil de la couleur est très souvent celui tissé des étoffes que Proust se plaît à décrire avec beaucoup de minutie et à mettre en relation avec l’art. Oriane de Guermantes porte un manteau « rouge Tiepolo », celui d’Albertine création de Mariano Fortuny évoque quant à lui les tableaux de Carpaccio.  

Ainsi, Mireille Laborie choisit-elle d’utiliser toutes les ressources de la couleur associées à un jeu sur les lignes et les textures pour évoquer l’univers de Marcel Proust.

Les couleurs choisies par l’artiste sont tout à la fois les couleurs de prédilection du romancier dans l’infinité de leurs nuances et celles qui sont liées à ses personnages féminins. Dans la palette de Mireille Laborie dominent le rose, le violet, le rouge. Ces couleurs renvoient tout autant au personnage d’Odette Swann qui est pour le Narrateur «  la dame en rose » aperçue chez son oncle Adolphe, qu’à celui de la Duchesse de Guermantes dont Proust décrit notamment « la cravate en soie mauve, lisse, neuve et brillante » ou en une autre occasion la « robe de satin rouge »  ou encore celle « striée d’or comme une aile de papillon 

Les couleurs répondent pour l’artiste comme pour l’auteur à une codification plurielle non dénuée d’ambiguïté et toujours ouverte à l’interprétation du lecteur comme du spectateur. C’est particulièrement le cas pour le violet ; cette couleur pouvant à la fois suivant ses tonalités ou la description à laquelle elle s’attache être synonyme de séduction ou de deuil, évoquer la noblesse comme la jalousie. Michel Butor dans un essai sur les œuvres d’art imaginaires chez Proust souligne aussi que «  la couleur mauve, caractéristique de l’époque, de l’art 1900, est aussi la couleur de l’ombre (Monet était alors défini comme celui qui avait découvert que «  toutes les ombres sont violettes »), couleur de ce qui ne se voit pas, de l’inexprimable, couleur de l’inanalysable. »

Pour évoquer l’aspect chatoyant des célèbres robes de Fortuny – notamment les robes « Delphos » inspirées de l’Antique, taillées très prêt du corps, coupées dans des soieries plissées et colorées qui ondoyaient au moindre mouvement en s’animant de reflets changeants - Mireille Laborie utilise des glacis d’or ou d’argent déposés en fine couche au dessus des fonds de couleur  ou  dispose des petites touches de peinture dorée et argentée régulièrement espacées qui diffusent une lumière vibrante et mobile sur la toile et la font irradier.

Le travail de Mireille Laborie sur la matière et les lignes - qu’il s’agisse des lignes creusées à l’aide d’un stylet dans l’épaisseur de la peinture ou des aspérités créées par accumulation de la matière ponctuant les toiles - se réfère à l’écriture et au patient travail d’élaboration de l’œuvre. Il entre en parfaite résonnance avec la fameuse page proustienne sur l’évocation du « petit pan de mur jaune » de la Vue de Delft de Vermeer qui « était si bien peint, qu’il était, si on le regardait seul, comme une précieuse œuvre d’art chinoise, d’une beauté qui se suffirait à elle-même » et devant lequel  Bergotte, le personnage d’écrivain de la Recherche, s’exclame quelques minutes avant de succomber à une attaque "C'est ainsi que j'aurais dû écrire […] Mes derniers livres sont trop secs, il aurait fallu passer plusieurs couches de couleur, rendre ma phrase en elle-même précieuse, comme ce petit pan de mur jaune."

A travers cette dernière phrase, s’éclaire tout l’enjeu du travail plastique de Mireille Laborie, qui vise à provoquer chez le spectateur de l’œuvre le même type d’émotion artistique que celle vécue par le lecteur de l’œuvre proustienne. Ses tableaux sont tous des petits pans de murs colorés et précieux où la superposition de couleurs, de matières et le croisement des lignes créent une vibration chromatique et lumineuse qui permet d’aller au delà de la nature physique de la couleur, pour en appréhender sa puissance évocatrice et accéder à la dimension poétique et spirituelle de l’œuvre.

© Martine Guillerm 2011

 

 

 

Peintures acrylique sur bois.Format 100/70 cm
Peintures acrylique sur bois.Format 100/70 cm
Peintures acrylique sur bois.Format 100/70 cm
Peintures acrylique sur bois.Format 100/70 cm

Peintures acrylique sur bois.Format 100/70 cm

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